dimanche 20 février 2011

Le tourisme durable

Avant d’aborder la notion de tourisme durable il faut relater les trente glorieuses (de 1945 à 1974) qui ont permis à des architectes et à des promoteurs de bétonner les montagnes pour construire des logements énergivores et implanter des remontées mécaniques à gogo sans se préoccuper de l’environnement et des paysages.

En 1995, sous l’égide de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT) la conférence de Lanzarote (Canaries) jette les premiers articles d’un code éthique en matière de tourisme. Les participants constatent que le tourisme est de plus en plus alimenté par les pays riches qui se déplacent vers les pays pauvres sans que l’inégalité qui existe soit quelque peu modifiée.

En France, les urbains en manque de nature, sont de plus en plus nombreux à la recherche de territoires protégés et authentiques. Le mot magique est lâché, l’authenticité va être mise à toutes les sauces à partir des années 95. Le tourisme vert, doux, à la ferme, l’agrotourisme font leur apparition dans les dépliants promotionnels.

Dans les montagnes, l’authenticité légendaire en a pris un coup sur la tête et si les montagnards sont encore là, souvent les financiers sont venus les remplacer pour récolter la mise et profiter de ce qu'il reste de ce patrimoine. La protection de l’environnement, la mise en valeur des paysages, la valorisation des richesses naturelles vont devenir des thèmes porteurs pour attirer les citadins aux sports d’hiver.

Le tourisme durable intègre les objectifs déjà portés par l’Agenda 21 voté au sommet de la terre à Rio de Janeiro en 1992:
1. Prévenir et réduire les impacts territoriaux et environnementaux du tourisme dans les destinations ;
2. Maîtriser la croissance des transports liés au tourisme et ses effets négatifs sur l’environnement ;
3. Encourager un tourisme favorable à un développement local durable maîtrisé par les acteurs du secteur ;
4. Promouvoir un tourisme responsable, facteur de développement social et culturel.

Aujourd’hui, de nombreux touristes sont sensibles à l’impact de leur périple sur la région qui les attire, ils expérimentent de nouvelles formes de voyages. Ils cherchent à être cohérents avec les principes citoyens qu’ils appliquent chez eux, mais aussi à améliorer la qualité de leurs vacances, pour faire du voyage une expérience authentique.

Ils vont donc apprécier de découvrir les savoir-faire locaux (artisanat, bois de construction, architecture…), de goûter aux spécificités locales surtout si elles sont remarquables (produits AOC, produits marqués, alimentation bio etc…).
Ils vont rechercher la qualité d’un patrimoine naturel exemplaire dans des espaces protégés, des parcs naturels régionaux ou des parcs nationaux.

Ils vont privilégier des activités touristiques et de loisirs en harmonie avec la sensibilisation et l’éducation à l’environnement. La question des remontées mécaniques bruyantes et polluantes est montrée du doigt ainsi que la neige de production qui a une certaine tendance à se généraliser malgré les problèmes posés par le détournement de l’eau, la dépense d’énergie nécessaire à la fabrication de la neige et l’implantation des réserves collinaires en pleine montagne.

La recherche actuelle du bien être, d’un cadre de vie harmonieux et de loisirs doux dépassent les simples prestations offertes par les téléskis, les télésièges et le forfait de ski alpin.
La diversification des activités en montagne est de plus en plus importante mais malheureusement beaucoup d’élus ont encore tendance à se focaliser sur le ski alpin et délaissent totalement l’aménagement spécifique à l'été et à l'automne. L’exemple est criant dans le Queyras. Ainsi,quand il s’agit de débloquer 7 ou 8 000 € par commune pour entretenir les sentiers pédestres, véritables patrimoine du territoire. Il faut des heures de discussion et des montages financiers complexes alors que pour implanter un télésiège les élus votent une dépense de 250 000 € en un clin d’œil ! (le nouveau télésiège 4 places de Saint Véran va coûter 4 500 000 euros).

Il faut savoir que la fréquentation touristique en 2009 pour les Hautes Alpes se répartissait de la manière suivante :
46 % en hiver, 43 % en été, 8 % au printemps et 3 % en automne
Alors que les investissements pour l’aménagement des stations de ski alpin se comptent par millions d’euros.

Le tourisme durable est une nécessité pour développer l’activité économique du tourisme en montagne, activité principale source de vie qu’il faut absolument maintenir en la diversifiant au maximum et en arrêtant de privilégier le ski alpin comme les élus continuent à le faire de tous côtés.

La charte européenne du tourisme durable qui vient d’être accordée au territoire du Queyras en été 2010, nous permettra peut-être de lancer la discussion et la réflexion sur toute cette problématique. J’espère au moins que les prestataires touristiques du Parc naturel régional du Queyras seront mobilisés afin d’exercer une dynamique suffisante pour obtenir rapidement un changement des mentalités dans le Queyras.

Février 2011
Luc Herry
Vice Président du PNRQ